Cession de fonds de commerce : les contrats d’exploitation ne se transmettent pas automatiquement

Lors d’une cession de fonds de commerce, on suppose souvent que tous les contrats liés à l’exploitation (location de matériel, fourniture, collaboration, etc.) suivent le nouveau propriétaire. Cependant, un arrêt récent de la Cour de cassation du 4 juin 2025 (n° 24‑11483) rappelle qu’à défaut de clause expresse dans l’acte de cession ou disposition légale spéciale, ces contrats ne sont pas automatiquement transférés. Ce principe est crucial pour éviter des litiges coûteux. Dans cet article, nous analysons les enseignements de cet arrêt, les précautions à prendre, et comment sécuriser vos transactions de reprise ou de cession.

L’importance de la rédaction de l’acte de cession

La vente d’un fonds de commerce est une opération juridique complexe qui ne se limite pas à un simple transfert d’enseigne ou de clientèle. Elle implique aussi une attention particulière à la transmission des contrats en cours, qu’il s’agisse de contrats de bail, de travail, ou de contrats liés à l’exploitation quotidienne du fonds. Si certains d’entre eux sont automatiquement transférés au repreneur, d’autres ne le sont pas, sauf stipulation expresse. Un arrêt rendu par la Cour de cassation le 4 juin 2025 (n° 24‑11483) vient confirmer avec force cette distinction essentielle.

Les faits à l’origine du litige

Dans cette affaire, un garage automobile exploitait son activité dans le cadre d’un contrat de location de matériel signé avec une société spécialisée. Parallèlement, une convention de collaboration avait été conclue entre le loueur et le fournisseur, permettant au garage de devenir propriétaire du matériel à l’issue du contrat. Quelques mois plus tard, la société de location décide de céder son fonds de commerce. À l’échéance du contrat de location, le repreneur considère que ce dernier a été tacitement reconduit, et réclame au garage le paiement des loyers. De son côté, le garage oppose un refus catégorique, arguant qu’il est devenu propriétaire du matériel en application de la convention de collaboration.

Saisi du différend, le juge de cassation va trancher une question cruciale pour toutes les opérations de transmission : quels contrats sont effectivement transférés avec le fonds de commerce ? Et quelles sont les obligations du repreneur à ce titre ?

La position de la Cour de cassation

La décision rendue par la chambre commerciale de la Cour de cassation est limpide. Sauf clause contractuelle expresse ou disposition légale spécifique, les contrats d’exploitation ne sont pas transmis de plein droit lors de la vente d’un fonds de commerce. Autrement dit, à la différence des contrats de travail, du bail commercial ou des contrats d’assurance, qui sont eux automatiquement transférés en vertu de dispositions légales spécifiques, les contrats annexes liés à l’exploitation ne bénéficient pas de ce régime.

En l’espèce, la convention de collaboration entre la société de location et le fournisseur — à laquelle le garage était indirectement lié — n’avait pas été mentionnée dans l’acte de cession. Dès lors, le repreneur ne pouvait pas légitimement revendiquer la poursuite ou la reconduction du contrat de location à son profit. La Cour a ainsi rejeté la demande de paiement des loyers formulée par le repreneur, au motif que le contrat ne faisait pas partie du périmètre transmis.

Un principe à ne pas négliger lors d’une transmission

Cet arrêt souligne un point fondamental du droit commercial : la cession d’un fonds de commerce n’entraîne pas la transmission automatique de tous les engagements contractuels. Ce principe, bien que connu des praticiens, reste encore trop souvent négligé dans les actes de cession, au détriment des parties.

Le repreneur ne peut se prévaloir d’un contrat existant entre le cédant et un tiers, s’il n’a pas expressément été transféré, ou si le tiers concerné n’a pas donné son accord, lorsqu’il est nécessaire. Il en résulte que le repreneur doit faire preuve d’une grande vigilance au moment de la reprise, notamment en identifiant avec précision les contrats qu’il souhaite maintenir. De même, le cédant a tout intérêt à clarifier dans l’acte de vente ce qui est transmis ou non, pour éviter d’être ultérieurement mis en cause.

Sécuriser juridiquement les cessions : un enjeu stratégique

Dans le contexte actuel où les reprises d’entreprises se multiplient, notamment dans les secteurs artisanaux et commerciaux, la sécurisation juridique des cessions devient un enjeu majeur. Un audit juridique préalable des contrats existants est fortement recommandé avant toute signature. Il convient d’identifier les contrats nécessaires à la poursuite de l’activité, de vérifier leur transférabilité, et d’insérer les clauses appropriées dans l’acte de cession.

Cette vigilance est d’autant plus cruciale que certains contrats peuvent comporter des clauses d’exclusivité, des conditions suspensives ou des interdictions de cession sans accord du cocontractant. En l’absence de clauses adaptées, le repreneur pourrait se retrouver dans l’incapacité d’exploiter l’activité dans les mêmes conditions que son prédécesseur, ce qui pourrait compromettre la rentabilité ou la viabilité du projet.

Conclusion : la clause expresse comme rempart juridique

L’arrêt du 4 juin 2025 vient rappeler avec clarté une règle essentielle : tous les contrats ne suivent pas automatiquement le fonds de commerce lors d’une cession. En matière de contrats d’exploitation, seule une clause expresse dans l’acte de vente peut garantir leur transfert. Faute de quoi, ni le repreneur ni le cédant ne peuvent revendiquer des droits sur ces engagements.

Pour éviter toute ambiguïté et sécuriser vos projets de cession ou de reprise, il est indispensable de se faire accompagner par des professionnels du secteur. La Parisienne du Commerce, experte en transactions commerciales, vous propose un accompagnement juridique personnalisé pour rédiger vos actes, auditer vos contrats et garantir une transmission sereine et conforme aux exigences du droit.

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